mardi 19 juin 2012

Un jour, un sorcier est venu frapper à la porte...

C'est une sorte de rituel imposé. Le héros d'un cycle d'heroic fantasy, en général, ne se doute de rien, au départ. Le destin, généralement sous la forme d'un vieux sorcier, vient frapper à sa porte. Vous noterez le terme "cycle". L'heroic fantasy, ça ne s'expédie pas, ça se déguste sur le long terme.

Dans le cas présent, le dénommé Terry Goodkind a écrit un honnête bouquin : La Première Leçon du Sorcier (le titre) L'Epée de Vérité (le nom du cycle) tome I. L'ensemble est honnêtement mené, le héros a de la carrure même "s'il n'a pas demandé à être là et voudrait bien rentrer chez lui", le vieux mage bougon bougonne et lance du feu, la belle sorcière est mystérieuse, le vert pays natal est en danger car au-delà de la frontière les forces du mal menacent. La petite touche personnelle : un peu de sadisme de temps à autre pour pimenter et donner un style. L'ensemble se lirait fort honnêtement si le souffle épique, élément nécessaire au genre, n'était pas totalement absent. Le grand Raymond E. Feist l'avait acquis au cours de son premier tome des chroniques de Krondor. Robert Jordan compte l'épique parmi ses rares qualités. Goodkind, dans son tome 1, ne l'effleure même pas. Son monde, que l'on traverse à pied en une semaine, semble constitué de quelques groupes épars d'individus. C'est très pratique quand on cherche quelqu'un, mais peut laisser songeur un lecteur tatillon.
Toutefois, et si l'on fait abstraction d'une absence totale de style, l'ensemble se lit bien, est inégal mais parfois agréable et a le bon goût de se conclure à la fin du livre.



Ce serait sans compter l'éditeur. Je l'entends d'ici.
"- Mais c'est qu'il s'est pas mal vendu, ton livre, coco. Pas mal du tout. Tu vas me faire la suite.
- Monsieur, j'avais terminé mon histoire...
- Je veux rien entendre. Tu m'en fais dix tomes de plus.
- Avec les mêmes idées.
- Evidemment. Bon, tu essaies de me rajouter un personnage et une nouveauté de temps en temps, mais sans stress. Fais durer, fils. Fais durer."

Bon soldat, Goodkind s'est exécuté. C'est là qu'arrive "La Pierre des Larmes", le tome 2... La copie du premier. Non seulement je me suis arrêté à la page 300, taraudé de questions existentielles sur l'inanité de la lecture, mais surtout sans le moindre regret. Goodkind écrit, mais il n'est en rien écrivain. L'ensemble est sans imagination, long, lent, et artificiellement épicé de passages sanguinolents plus ou moins sadiques pour donner un fallacieux sentiment de rythme.



L'ensemble est édité en français chez Bragelonne. J'aurais dû me méfier.

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